Béhaviorisme et domaines de l’Analyse expérimentale du comportement

Lorsque l’on parle de béhaviorisme et d’analyse expérimentale du comportement, on parle de différents domaines de l’analyse du comportement. Ces domaines sont :

Analyse expérimentale du comportement (EAB – Experimental Analysis of Behavior) : une approche scientifique (découlant des sciences naturelles) visant à découvrir les relations entre comportements et différents types de variables environnementales

ABA – Applied Behavior Analysis (Analyse comportementale appliquée) l’application des principes découlant de l’EAB afin d’améliorer des comportements socialement significatifs et l’utilisation d’expérimentations pour identifier les variables responsables des modifications des comportements

Béhaviorisme (comportementalisme) – la philosophie dérivant de ces deux champs (EAB et ABA), il existe différents « types » de behaviorisme (méthodologique – radical – molaire – moléculaire…). (Note : ce n’est pas parce que l’on utilise / travaille en ABA qu’on adhère à cette philosophie, cette croyance).

Lorsqu’on parle de ces domaines de l’analyse du comportement, on parle aussi des « pratiques guidées par l’analyse du comportement » qui consistent en l’utilisation des principes de l’ABA et EAB pour aider les individus à  se comporter avec succès (Cooper, Heron & Heward, 2007).

Béhaviorisme EAB ABA Pratiques guidées par l’analysedu comportement
Domaine d’application
Recherche fondamentale
Recherche appliquée
Aider les individus à améliorer leurs vies
Aider les individus à améliorer leurs vies
Activité principale
Analyse conceptuelle et philosophique
Créer, conduire interpréter et rendre compte d’expériences fondamentales
Technologie pour améliorer des comportements socialement significatifs
Améliorer les vies des individus grâce à des changements de comportements
Testabilité / Réfutabilité
Partielle et faible car des contingences et des variables ne sont pas disponibles (ex : contingences phylogénétiques)
Totale – les expérimentations doivent donner toutes les informations nécessaires à la reproduction des résultats
Presque totale – des limitations existent, dues notamment aux différences interindividuelles, à l’éthique et à l’apparition d’événements incontrôlables
Partielle – toutes les variables importantes ne sont pas disponibles/modifiables, par exemple la vie à l’école

Comportements sociaux

L’augmentation des compétences sociales est également un point qui revient régulièrement lorsque l’on parle d’autisme. Il est vrai que grand nombre de ces enfants paraissent insensibles à la présence d’autrui, ou ne se soucient que très peu de cette présence. Il est important de se demander ce qui, pour des enfants typiques, renforce les comportements sociaux car c’est ce qui va nous permettre de proposer des exercices spécifiques pour les personnes atteintes d’autisme. Si ce qui renforce « habituellement » les comportements chez des enfants typiques n’est pas renforçant pour l’enfant avec autisme, il faudra utiliser d’autres renforçateurs avant de progressivement se déplacer vers des contingences plus naturelles.

Comme pour le langage, il est plus qu’utile de se munir d’un curriculum type VB-MAPP pour nous aider à évaluer le niveau de l’enfant et décider des priorités pour ce domaine en particulier.

Un des premiers comportements sociaux apparaissant chez les très jeunes enfants (ne parlant pas encore) consiste en le fait, si les deux enfants sont placés dans la même pièce avec des jouets en deux exemplaires, de prendre le même objet que le pair. Il semblerait que ce comportement imitatif puisse jouer un rôle dans les comportements sociaux, ce qui doit nous encourager dans des programmes ABA à travailler l’imitation spontanée et pas seulement l’imitation sur consigne (évidemment ce n’est pas la seule raison pour travailler l’imitation spontanée!).

Les comportements sociaux sont également renforcés par le fait de recevoir quelque chose de tangible, comme lorsqu’un enfant donne à un autre un jouet. Il faut donc s’assurer que ce comportement est présent chez les enfants dont on s’occupe. Cela peut commencer par le fait que l’enfant accepte de recevoir des renforçateurs de la part d’autres personnes que les personnes habituelles.

Une remarque valable dans tous les cas : le fait, comme pour les comportements verbaux, que les activités / renforçateurs préférés de l’enfant ne soient pas en libre accès permet d’augmenter l’attractivité du monde social car l’enfant est obligé de passer par ce monde social pour obtenir ce qu’il désire. Ainsi, les personnes de l’environnement, par association avec l’obtention de renforçateurs deviennent elles-mêmes des renforçateurs !

Lorsque l’enfant accepte les objets donnés par autrui, il faut aussi qu’il puisse se déplacer pour aller les chercher. Il doit pouvoir regarder les membres de son environnement social, suivre des instructions données par d’autres, imiter des enfants, accepter d’être proche d’eux. Ensuite, il doit pouvoir s’engager dans des jeux avec eux et cela très souvent demande un entrainement spécifique, par exemple au « bureau » avant de pouvoir généraliser ces compétences à des environnements plus complexes.

Une compétence importante à travailler également consiste en le respect des alternances de tour (« à toi …à moi …etc. »). Le fait que l’on travaille en paralèlle sur le langage, va permettre à l’enfant d’être plus efficace dans ses comportements sociaux et bien évidemment la spontanéité des commentaires et demandes est hautement désirée. Enfin, une dernière idée si vous voulez augmenter les compétences de jeu d’enfants avec autisme (mais tout ce qui est présenté n’est évidemment pas du tout exhaustif), c’est de viser tout ce qui consiste en du jeu symbolique (utiliser le jeu à d’autres fins que ce pour quoi il est prévu), c’est à travailler si l’enfant à déjà un niveau de compréhension du langage et de jeu simple lui permettant de jouer tout seul et de bien comprendre de nombreuses instructions.

Pratiques proactives

Quelques pratiques « pro-actives » pour éviter l’apparition de comportements problèmes

Si nos pratiques éducatives sont adaptées à l’enfant et bien organisées, on réduit une grande part de la possibilité d’apparition de comportements indésirables. Pour des personnes atteintes de troubles du développement, la communication, le jeu, la socialisation doivent toujours être centraux dans les programmes éducatifs.

On peut (par exemple) :

S’amuser !!! Programmer régulièrement des moments de pairing. L’enfant doit s’amuser, et l’adulte aussi. Ceci influe sur les capacités des deux personnes impliquées, et réduit « l’envie » de s’échapper.

– Bien aider de façon préventive l’enfant lorsqu’on lui présente une nouvelle tâche, afin qu’il soit immédiatement en situation de réussite. Et seulement plus tard travailler pour qu’il sache faire les activités tout seul.

– donner à l’enfant des opportunités de choix ! (ex :  » tu veux empiler les cubes ou faire du dessin ? « , « tu veux des feutres ou des crayons ?  » etc.). Nous sommes nombreux à apprécier avoir un certain contrôle sur les situations.

– utiliser un taux de renforcement suffisament élevé. Varier les renforçateurs et garder l’enfant en réussite, guider s’il est en échec, si l’activité est difficile ou nouvelle. Ne pas attendre qu’il commence à s’énerver pour donner des renforçateurs !

– donner des pauses : Il arrive fréquemment que les personnes s’occupant de l’enfant soient renforcées positivement par sa réussite et oublient qu’il est en train de travailler et que cela lui coûte de l’énergie !

Attention (notamment) à ne pas :

– donner un taux plus élevé et plus de renforçateurs quand l’enfant est déjà énervé et très agité

– utiliser un vocabulaire négatif (« ne fais pas… » « il ne faut pas » « ce n’est pas bien »)

Chapitre 1 – Au début, il y avait les comportements

Quand on parle d’ABA, on parle de façon scientifique. On s’attache à décrire et modifier des phénomènes observables, on parle de variables dépendantes et de variables indépendantes et évidemment de comportements. Ce que l’on va vouloir modifier, ce sont des comportements mais dans notre terminologie, des comportements c’est quoi ?

Les comportements sont les activités des organismes vivants, ce sont ce que les gens font, y compris la façon dont ils se déplacent, ce qu’ils disent, pensent et ressentent (Cooper, Heron, Heward, 2007, p.25). Les comportements ont une ou plusieurs dimensions, ils peuvent être observés, mesurés, décrits. Il est important de noter dès maintenant que des comportements sont des événements décrits de façon objective et lorsque l’on parlera de certains comportements nous voudrons qu’il y ait le moins possible de place à l’interprétation.

Définir des comportements

Vous lisez certainement ces pages parce que vous désirez modifier/enseigner des choses, des compétences, des aptitudes … donc des comportements ! Que ce soit rester silencieux en classe, faire des additions, s’habiller ou aller seul aux toilettes etc. Dans le domaine de l’ABA, nous allons devoir définir les comportements correctement pour plusieurs raisons.

Si la définition du comportement est vague ou peu précise, mon action sera elle aussi vague ou peu précise… Mais si mes objectifs sont clairs dès le départ, je saurai vers quoi je vais, je saurai à quel moment l’objectif est atteint, je saurai si les « choses changent » ou pas.

Egalement, si les comportements ne sont pas bien définis, si par exemple, on dit à une famille que leur enfant doit apprendre à « avoir confiance en lui » ou qu’on va lui enseigner à « s’intégrer dans le groupe-classe » (ce que font de nombreux professionnels), comment en tant que parent s’assurer qu’il paie ce professionnel pour quelque chose de concret ?

Mais si on dit aux parents que d’ici deux mois leur fils devra être capable de lever au moins 5 fois par semaine la main en classe pour répondre aux questions de l’instituteur, ne croyez-vous pas que chacun y gagnera ? Les parents car ils pourront s’assurer de l’efficacité de ce qui leur est proposé… le thérapeute car il pourra s’assurer rapidement de ne pas se tromper dans ce qu’il propose…et bien sûr l’enfant car il augmentera ses chances d’être félicité par l’instituteur et peut être de gagner une certaine reconnaissance de ses pairs!

Pour définir correctement un comportement il faut qu’il soit :

– observable (on peut le voir)

– mesurable (on peut le comptabiliser)

– spécifique (on peut fermer les yeux et se l’imaginer).

Note : entrainez-vous à parler de la façon la plus claire possible dans la vie de tous les jours, avec votre conjoint(e) ou petit(e) ami(e), avec vos enfants…vous verrez que de nombreux malentendus ou quiproquos peuvent être évités de cette façon.

Il faut faire la distinction entre comportement et réponse : une réponse est une occurence, une apparition d’un type ou d’une classe de comportement. Ex : mon objectif est d’augmenter les comportements de requêtes d’un enfant. Mais lorsque je travaille en séance avec lui, sur mes grilles de cotation, je note l’apparition de réponses. Dans le quotidien, on a tendance à utiliser le mot comportement alors qu’on fait référence à des réponses…

Mesurer des comportements

Il existe trois techniques pour mesurer les comportements : l’enregistrement automatique, l’enregistrement direct, et l’enregistrement par observation.

L’enregistrement automatique

Des systèmes enregistrent automatiquement le nombre, type, fréquence, latences etc. des réponses.

L’enregistrement direct

Dans ce type d’enregistrement, on va analyser les traces laissées par le comportement, par exemple le nombre perles enfilées sur un fil, le nombre de notes supérieures à 15/20 au bout d’un mois à l’école…

L’enregistrement par observation

On va observer le comportement et noter les différents aspects de celui-ci. On utilise cette méthode de mesure lorsque le comportement ne laisse pas de traces visibles. Il existe différentes façons d’enregistrer des comportements par observation, on peut ainsi :

– enregistrer sous la forme ABC, donc analyser les antécédents et les conséquences d’un comportement, notamment pour analyser les comportements à réduire. Cela permet de connaître les antécédents et les conséquences d’un comportements avant de préparer une intervention.

– enregistrer le nombre de comportements qui sont apparus, par exemple le nombre de fois où un enfant imite correctement un geste ou le nombre de fois où il va aux toilettes dans une durée de 24 heures.
On utilise cette technique dans le cas de réponses clairement discrètes, avec un début, une fin et une durée quasi identique.

– enregistrer la durée du comportement, pour ce faire, soit on note le début et la fin du comportement, soit on utilise un chronomètre qui nous indique la durée du comportement. Un autre type de durée est la latence, le temps écoulé entre un événement et le comportement, ce peut être par exemple, le temps écoulé entre le moment où je donne les instructions et le moment où l’enfant l’exécute.

– enregistrer par intervalle de temps.
On observe le comportement pendant une période de temps précise, divisée en intervalles courts (souvent 10 secondes). On indique l’occurrence ou la non-occurrence du comportement dans chaque intervalle. On peut enregistrer par intervalle complet (le comportement doit durer pendant la totalité de l’intervalle) ou par intervalle partiel (le comportement doit uniquement apparaitre pendant l’intervalle sans minimum de durée).

Cooper, J. O., Heron, T. E. & Heward W. L. (2007). Applied Behavior Analysis. Pearson Prentice Hall : USA.

Chapitre 7 – Comment se créent et sont créés de nouveaux comportements

Nous présenterons ici le façonnement et le chainage qui sont les procédures habituellement utilisées pour enseigner de nouveaux comportements. Cooper, Heron & Heward (2007) présentent un chapitre à part sur l’imitation comme moyen de développer de nouveaux comportements, nous en parlerons également.

Façonnement

Le façonnement est le renforcement différentiel d’approximations successives d’un comportement cible jusqu’à ce que la personne fasse le bon comportement. Comme un potier part d’un bloc de terre pour créer un vase, nous partons d’une ébauche (même lointaine) du comportement pour arriver à ce qui est voulu.

Pour commencer, il faut identifier un comportement qui est une approximation du comportement cible : c’est ce que l’on appelle le comportement de départ (« starting behavior »). On renforce ce comportement de façon à ce que sa probabilité d’apparition augmente. Puis on renforce un nouveau comportement plus proche du comportement cible, et ce jusqu’au comportement cible.

S’il n’existe pas de comportement approximant le comportement cible, il est nécessaire d’utiliser des guidances (prompts en anglais) pour avoir « quelque chose à renforcer », puis de retirer ces guidances afin que le comportement soit contrôlé par les « bons » stimuli de l’environnement et pas par nos guidances.

Les applications de cette procédure sont quasiment illimitées, on peut l’utiliser pour améliorer la motricité, le langage, l’imitation etc.

Un exemple d’application : Jackson & Wallace (1974) utilisent le façonnement pour amener une jeune fille de 15 ans avec retard mental, précédemment aphone, à progressivement augmenter l’intensité sonore de ses paroles, jusqu’à un volume typique.

Avec du façonnement, je vais par exemple commencer à renforcer un comportement (accepter de prendre un stylo dans la main) très éloigné du comportement cible (écrire son prénom) et je vais renforcer des étapes de plus en plus proches, au fur et à mesure des apprentissages (faire un trait sur la feuille, puis gribouiller, puis faire un trait horizontal etc.).

Chaînage

Dans de nombreuses situations, ce sont des comportements complexes qu’il va falloir mettre en place et la guidance ne suffit plus. Un comportement complexe consiste en plusieurs sous-comportements qui apparaissent dans une séquence appelée chaîne de comportements (par exemple : ouvrir la porte de sa voiture, s’asseoir, fermer la porte, mettre la ceinture etc.).

Le chaînage consiste en l’enseignement d’une chaîne de comportements.

Dans une chaine de comportements, chaque sous-comportement de la chaîne produit un changement dans l’environnement qui agit comme stimulus discriminatif (SD) pour la réponse suivante dans la chaîne. Pour parler plus simplement, c’est ce changement dans l’environnement qui indique à la personne que les conditions sont réunies pour que l’étape d’après se mette en route et puisse amener à l’obtention d’un renforçateur.

Ainsi, dans une grande chaîne de comportements comme « acheter du pain » (en admettant que l’on est déjà dehors et que l’on a de la monnaie sur nous), le premier comportement (aller vers la boulangerie) produit un SD (je vois la porte de la boulangerie) pour le second comportement (ouvrir la porte de la boulangerie). Ce second comportement produit un SD (voir la porte ouverte) pour le troisième comportement (entrer dans la boulangerie) etc etc etc… (évidemment chaque étape peut être sous-divisée en d’autres étapes s’il le faut, par exemple, ouvrir la porte = tendre la main vers la poignée + regarder s’il y a un écriteau disant de tirer ou pousser + faire le geste correspondant).

Lorsque l’on veut faire du chaînage, il faut effectuer ce que l’on appelle une analyse de tâche. Ce terme correspond au fait de diviser une tâche complexe en étapes plus simples, que l’on pourra enseigner. Essayez par exemple de continuer l’analyse de tâche correspondant à « acheter du pain », on en était à la troisième étape, « j’entre dans la boulangerie ».

Une fois cette analyse de tâche faite, on doit évaluer le ou les étapes qui sont déjà réussies, dans ou hors de la chaîne ; et la façon dont les étapes sont d’ores et déjà enchainées. Ceci donne en fin de compte la ligne de base du comportement.

Pour enseigner une chaîne de comportement je peux ensuite utiliser différentes procédures : chaînage avant, chaînage arrière, chaînage total de la tâche.

Dans le cas de chaînes complexes, dans lesquelles il existe des sous-comportements que la personne ne sait pas faire, et afin de ne pas devoir enseigner deux choses à la fois (réaliser le comportement et l’incorporer dans la chaine), il est très souvent conseillé de travailler ces nouveaux sous-comportements de façon séparée, hors de la chaine, par exemple en situation « bureau ».

Chainage avant

Dans cette procédure, on enseigne (et donc on renforce) les comportements dans leur ordre d’apparition. J’enseigne à réaliser le premier comportement (et donc je renforce immédiatement après ce premier comportement). Une fois qu’il est correctement appris, je guide l’élève pour qu’il enchaine premier et second comportement (et je renforce après l’apparition de ces deux comportements) ; ensuite, je ne renforce qu’après que les comportements 1 – 2 et 3 soient réalisés…

Chainage arrière

Dans cette procédure, on commence l’enseignement par la dernière étape. C’est à dire que l’on guide la réalisation et l’enchainement de tous les comportements jusqu’à ce que le dernier soit réalisé correctement. Ce n’est qu’à la fin de la chaine, après le dernier comportement que l’on donne le renforçateur. Une fois que c’est bon pour la dernière étape, on guide tous les comportements mais ce sont les deux derniers qui doivent être réussis et enchainés (et on ne donne toujours le renforçateur qu’à la fin), ensuite ce sont les 3 derniers etc…

Chaînage total de la tâche

Dans cette procédure, on aide la personne, si elle en a besoin, à tous les niveaux de la chaine, jusqu’à ce qu’elle soit capable de la réaliser seule, en entier. Le renforçateur est donné à la fin de la chaîne.

 

Imitation

Etre capable d’imiter des comportements que l’on observe est un moyen très efficace d’apprendre de nouveaux comportements. Si par exemple je me retrouve dans un pays étranger et que je veux prendre le métro, il est fort probable que je prendrai quelques minutes pour observer la façon dont les gens procèdent, avant d’essayer de faire comme eux.

C’est une des raisons pour lesquelles, si un enfant à un répertoire imitatif peu développé, il va faloir très vite commencer à l’augmenter. Habituellement nous commençons par enseigner à la personne des imitations avec des objets, puis des imitations de motricité globale, de motricité fine etc. Dans ces apprentissages, il faut évidemment utiliser de façon appropriée les guidances, l’estompage des guidances, les renforçateurs etc.

Une autre raison du travail précoce sur l’imitation est que dès que l’enfant va réussir à imiter, on va pouvoir utiliser les guidances modeling (imitatives) plutôt que d’autres guidances plus intrusives pour enseigner de nouveaux comportements. Exemple si je veux apprendre à un enfant à taper dans ses mains suite à la consigne « fais bravo ». Si l’enfant n’a pas de répertoire imitatif je vais devoir le guider physiquement (lui prendre les mains et le faire taper), ce qui peut être aversif… S’il a un répertoire imitatif, je vais lui donner l’instruction, faire le geste en face de lui et il va m’imiter ! Cela permet d’accélérer et faciliter les apprentissages.

Il est également important de travailler sur l’imitation spontanée, c’est à dire l’imitation sans que l’adulte ne donne d’instruction spécifique.

Jackson, D. A., & Wallace, R. F. (1974). The modification and generalization of voice loudness in a fifteen-year-old retarded girl. Journal of Applied Behavior Analysis, 7, 461-471. Disponible ici

Chapitre 9 – Et pour diminuer un comportement un comportement ?

Il existe différentes façons pour faire diminuer un comportement. Lorsque nous utilisons l’ABA avec des personnes en difficulté, il me semble qu’il vaut toujours mieux savoir quelle est la fonction du comportement, ce par quoi il est renforcé avant de commencer à agir dessus. Pour connaitre la(les) fonction(s) d’un comportement, on doit réaliser une analyse fonctionnelle, ceci est présenté dans la partie sur les applications de l’ABA.

La première procédure que je vais présenter est la punition. Je vais la présenter en premier, parce que justement, c’est en DERNIER ressort que l’on peut avoir recours à ce genre de procédure. Ensuite vous trouverez des informations sur l’extinction et le renforcement différentiel.

Punition

Extinction

Renforcement différentiel

 

Punition

Pour quoi ai-je dit que la punition est à utiliser en dernier ressort ?

Les effets de la punition sont : à court terme, un arrêt du comportement perturbateur (parfois) et une « tranquillité » de l’enseignant qui risque (malheureusement) d’être amené à réutiliser la punition dans le futur; à plus long terme, souvent on a une réapparition des comportements (car on ne s’est pas occupé de leur fonction). On a de plus, souvent une apparition de réactions émotionnelles « imprévisibles » (frustration-violence-agression), une réduction du « bien-être » des personnes environnantes, et la punition provoque aussi l’apparition d’autres comportements tout autant inappropriés mais moins visibles.

En fin de compte,

il n’y a pas d’éducatif dans la punition : on n’apprend pas à l’enfant comment bien faire !

Ceci dit, entrons dans la description de ce qu’est la punition.

Tout comme il existe deux types de procédures de renforcement (positif et négatif), il existe deux procédures de punition.

Dans la punition négative, c’est le retrait de choses agréables, de renforçateurs, suite à l’apparition d’un comportement qui va faire que le comportement va diminuer. L’exemple typique est quand avec une voiture on fait un excès de vitesse et qu’on est verbalisés par la police, on perd des points et de l’argent (amende), donc dans le futur il y a une moins grande probabilité que l’on recommence à faire des excès de vitesse. Un autre exemple : lorsqu’un enfant joue avec de la nourriture qu’il apprécie au lieu de la manger, le fait de lui enlever cette nourriture appréciée va faire que dans le futur il y aura une moins grande probabilité qu’il joue avec la nourriture.

Dans la punition positive, c’est la présentation de stimuli aversifs, suite à l’apparition du comportement, qui va faire que le comportement va diminuer. Par exemple, si je ne mets pas de gant pour sortir un plat du four, la douleur va être suffisamment aversive pour que je n’oublie pas le gant la prochaine fois.

Lorsque l’on décide d’utiliser des procédures de punition il est absolument nécessaire de s’assurer que le comportement diminue, des mesures précises doivent être prises afin de ne pas continuer à mettre en place une procédure qui ne fonctionne pas.

Extinction

L’extinction consiste en la « non-présentation » des conséquences habituellement associées à un comportement. Autrement dit, lorsque le comportement apparait, il ne doit pas être renforcé. L’extinction n’est pas d’ignorer l’enfant ou la personne comme je l’entends souvent. Il existe différents types d’extinction liés à la fonction du comportement.

Si l’on reprend le schéma décrivant l’apprentissage opérant, lorsque l’on fait de l’extinction, on se retrouve dans ce cas :

Dans un environnement donné

:

un comportement apparait

ce qui

ne produit plus le résultat attendu ou habituel

Ne produisant plus de conséquence positive, le comportement va diminuer car il « ne sert plus à rien »…

Ainsi, si un comportement a pour fonction d’échapper à une tâche, le fait de ne plus pouvoir échapper va faire que le comportement va diminuer. Si un comportement sert à provoquer une réaction chez son père, le fait que la réaction du papa n’arrive plus va faire diminuer le comportement.

Lorsque l’on pratique de l’extinction, tout le monde dans l’environnement de la personne doit l’appliquer, on doit être sûrs que l’on va pouvoir tenir et que la personne ne va pas se mettre en danger ou risquer de mettre en danger d’autres personnes. Peu après le début d’une procédure d’extinction va apparaitre un « pic d’extinction », c’est à dire une augmentation du comportement en fréquence / intensité / durée etc. C’est le moment où il faut « s’accrocher » et être sûrs de tenir sinon on risque de renforcer un comportement encore plus inadapté que celui que l’on voulait diminuer. Egalement, lors d’un pic d’extinction, va apparaitre ce que l’on appelle de la variabilité comportementale, c’est à dire que le comportement risque de se modifier, ou d’autres comportements ayant la même fonction vont apparaitre. Il faut alors éviter de renforcer ces « variations sur le même thème »… Pour diminuer le pic d’extinction, l’utilisation de renforcement différentiel est très utile.

Renforcement différentiel

La plupart du temps on n’utilise pas l’extinction seule mais on la couple avec le renforcement de différents comportements, c’est ce qui s’appelle du renforcement différentiel. Le renforcement différentiel est une procédure très efficace et devrait être utilisée en premier lieu pour diminuer des comportements non désirés.

Dans le renforcement différentiel, en même temps que l’on ne présente plus les conséquences habituellement associées à un comportement (extinction), on va renforcer d’autres comportements. Il existe différents « raffinements » de cette procédure, je vais en présenter succinctement quelques-uns. Je vais utiliser les initiales anglaises DRx, où DR signifie Differential Reinforcement et ‘x’ est une lettre spécifiant le type de renforcement différentiel.

DRA – Differential Reinforcement of Alternate behavior = Renforcement Différentiel de Comportements Alternatifs

Lorsque l’on fait du DRA, on renforce un comportement approprié ayant la même fonction (« servant à la même chose ») que le comportement inapproprié ET on ne renforce pas ce comportement inapproprié. Un exemple : apprendre à un enfant à demander de l’aide lors des exercices plutôt que de jeter le matériel à terre.

Il est hautement recommandé de faire une analyse fonctionelle du comportement que l’on veut réduire, afin de bien identifier le comportement alternatif que l’on va enseigner, qui doit avoir la même fonction que celui à réduire.

DRI – Differential Reinforcement of Incompatible behavior = Renforcement Différentiel de Comportements Incompatibles

C’est une variation de la procédure de DRA. Dans cette procédure, le comportement qui est renforcé est physiquement incompatible avec le comportement que l’on désire réduire. Par exemple, répondre à des questions posées par un éducateur empêche un enfant de faire en même temps des écholalies… poser les mains sur la table de travail est incompatible avec de nombreux comportements d’autostimulation impliquant l’utilisation des mains.

DRO – Differential Reinforcement of Other behaviors = Renforcement Différentiel d’Autres Comportements

Dans cette procédure, on délivre un agent renforçateur, lorsque le comportement que l’on désire réduire n’apparaît pas pendant une certaine durée. De la même façon que précédemment, on ne délivre plus d’agents renforçateurs lorsque le comportement inadapté apparaît. Dans cette procédure, en quelque sorte, on tente donc de renforcer tous les comportements autres que celui que l’on désire réduire.

La durée initiale après laquelle on donne un renforçateur si le comportement n’est pas apparu devrait être adaptée en fonction de ce qui a été observé en ligne de base, puis progressivment augmentée.

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Encore une fois, il est toujours préférable de consulter des spécialistes du domaine lorsque l’on désire diminuer des comportements ou proposer des apprentissages adaptés à l’enfant. Le fait qu’un procédure ait fonctionné avec telle personne ne veut pas dire qu’elle fonctionnera avec une autre. Aucune procédure ne devrait être réutilisée sans avoir évalué si elle est adaptée…il y a de trop gros risques, surtout lorsque l’on parle de problèmes de comportement.